Lors du précédent et excellent BarCamp Lillois consacré à l’Entreprise 2.0 et ses Usages, j’avais proposé une session improvisée sur le sujet “Entreprise 2.0 et courbe d’apprentissage”. J’avais initié la discussion en présentant la courbe suivante que je présentais publiquement pour la première fois, et que j’utilise déjà depuis plus d’un an pour étayer et décrire les modèles d’apprentissage des usages des outils du Web 2.0 appliqués à l’entreprise.
Cette courbe est en fait le résultat de la consolidation de 8 années de retour d’usage en terme de déploiement de systèmes collaboratifs auprès des utilisateurs, affinée cette dernière année par la prise en compte des différents retours d’usage des projets de déploiement d’entreprise 2.0 que nous avons effectué chez Kimind auprès d’un certain nombre de grand comptes ou d’organisations, françaises, européennes, américaines et indiennes.
Cette courbe se décompose en deux axes, un axe temporel et un axe consacré à la mesure de l’éfficacité (au sens de le productivité aussi bien individuelle que collective). Car je pars du constat que l’usage de tels outils apporte SURTOUT des gains de productivité, démontrables et mesurables, et que ce doit être le facteur clé de décision d’une direction générale pour oser franchir le pas de l’Entreprise 2.0, bien avant toute autre considération qualitative sur lesquelles s’appuyer en second plan.
Les différentes phases décrites dans cette courbe sont très importantes à prendre en compte bien avant le lancement du projet de déploiement, car c’est à partir de cette connaissance qu’il sera possible d’anticiper et de mettre en place les mesures d’accompagnement nécessaires à la transformation des usages afin d’obtenir les résultats escomptés.
On distingue 4 étapes d’apprentissages et 3 phases de temps. Ces phases de temps sont des durées moyennes bien entendu, en fonction du contexte et de l’existant en terme d’outils collaboratifs dans l’entreprise, elles peuvent être plus ou moins courte ou longues.
La toute première étape (perte de temps – incompréhension) correspondant à une phase de rejet des nouveaux usages par les utilisateurs, peut même être lissée dans certains cas où la motivation ou l’expérience sont au rendez-vous, à un très fort niveau, comme nous l’avons vu sur plusieurs projets. Mais en règle générale, les premières réactions vont au rejet de ces nouvaux usages, car il est prosaïquement beaucoup plus simple d’envoyer une information par email ou de stocker son information dans un fichier que de prendre le temps de changer cet usage ancré depuis plus de dix à vingt ans maintenant chez les utilisateurs. Et le sentiment de perte de temps, réel bien souvent au début, va dominer l’individu et le faire reculer, ne voyant que son gain à court terme et ne comprenant pas l’effort nécessaire à effectuer.
Cette première période est donc critique, car d’elle dépendra le succès de la suite ou non. Nous avons malheureusement vu tout au long de ces années beaucoup trop d’utilisateurs revenir en arrière quelques semaines après avoir utilisé ces nouveaux outils du web 2.0 et repasser à l’usage de la messagerie et de la gestion de fichiers. Le manque de projet collectif, d’accompagnement, de motivation… n’avaient pas permis de franchir cette première étape indispensable.
Mais une fois franchie, on entre dans l’étape d’apprentissage (compréhension) des fonctions et de découverte des avantages à changer d’usages. On retrouve alors à peu près la même efficacité qu’avec l’email et les fichiers, avant d’accèder à la troisième étape qui elle prend un temps plus important, celle de l’acquisition (assimilation) de ces nouvaux usages et de leur appropriation par rapport à ses processus de travail.
On sort de la phase d’apprentissage en comprenant ce que l’on peut faire avec les outils, pour entrer dans la phase d’assimilation en sachant comment utiliser ces outils pour avoir un bénéfice métier tangible en terme d’efficacité et de productivité. C’est en général un plateau de quelques mois, où les différents usages sont tellement nombreux et tellement nouveaux parfois qu’il faut du temps pour les intégrer.
Mais une fois franchie cette étape, le gain en productivité s’accélère, et on entre définitivement dans l’étape d’adoption, où il n’est plus possible à l’utilisateur de revenir en arrière, tellement les gains sont importants, aussi bien en terme d’efficacité individuelle que d’efficacité collective, et l’usage de ces nouveaux outils de l’entreprise 2.0 deviennent une seconde nature pour lui et transforment radicalement ses usages.
D’ailleurs ces utilisateurs deviennent alors des évangélistes des usages, mais j’en parlerai en détail dans un prochain billet.
En conclusion, n’oubliez donc pas d’anticiper sur ces différentes étapes et ces différentes périodes de temps nécessaires à faire changer une organisation, car les gains business en dépendront.
Mais le vrai bénéfice sera au rendez-vous et les utilisateurs entreront dans une vision moderne de leurs usages, et se libèreront ainsi d’un nombre incroyable de contraintes que la plupart des entreprises se traînent encore comme des boulets aux pieds depuis plusieurs années.
Technorati Tags: Entreprise 2.0, Enterprise 2.0, Apprentissage, Efficacité, Productivité
Pingback: links for 2008-07-11 | Les Giraultises blogguent
Excellent !
Je retrouve pas mal de similitudes entre votre courbe et la façon dont un changement (de quelque nature que ce soit) se propage dans une organisation.
A cette enseigne, le “Change Monster” de Jeanie Daniel Duck (http://www.bcg.com/impact_expertise/publications/Book_Change_Monster.html) constitue selon moi une référence.
Très bon billet et représentation graphique.
J’y retrouve dans cette courbe d’expérience celle que j’ai pu acquérir en gérant des développeurs externalisés.
Il faut une période d’adaptation des 2 côtés pour synchroniser nos habitudes avant de parvenir à une belle phase d’efficacité.
Pingback: Bookmarks du 07/07/2008 - Bloc-Notes de Bertrand Duperrin